Varron d’Atax (-82/-37)  Varron d’Atax est un poète épique. Cet exact contemporain de César ne nous a laissé qu’un vers et le titre d’une de ses œuvres, mais quel titre !   « De bello sequanico » - La guerre contre les Séquanes.

  Il y eut donc une guerre chez les Séquanes ?  Et si riche en événements grandioses qu’elle pût inspirer une épopée ?

  On n’en connaît qu’une seule dont les combats aient pu tenir ce rang pour un poète Romain de l’époque de César : le siège de l'Alésia antique.

  Preuve indirecte peut-être mais non négligeable. Et qui sait, peut-être refera-t-elle surface dans un manuscrit retrouvé…   Mais le cherche-t-on vraiment ?


  Plutarque (46/125) - Référence : Vies parallèles des hommes illustres, Chapitre XXVI.  L’auteur grec des « Vies des hommes illustres » consacra son chapitre XXVI à Jules César. Il évoqua le siège de l’Alésia antique et donna quelques précisions sur le combat de cavalerie qui précéda le début du siège.

  - Le texte de Plutarque sur les Séquanes
  La traduction choisie par Michel Reddé est celle de Robert Flacelière : « C’est pourquoi [César] leva le camp de l’endroit où il se trouvait et franchit le territoire des Lingons dans l’intention de gagner celui des Séquanes, peuple ami qui se situait devant l’Italie face au reste de la Gaule. Alors, attaqué et cerné par plusieurs dizaines de milliers d’ennemis il entreprit de livrer une bataille décisive. »

 - La traduction proposée
  Elle réduit malheureusement la précision du texte et en affaiblit le sens. Le verbe traduit ici par « franchir » (hyperébale) composé avec « hyper » (dont le sens est resté bien vivant en français) marque l’idée du complet dépassement, de l’entier franchissement ou le fait « d’aller au-delà » ce qui ne ressort pas vraiment de la traduction choisie.
  D’autre part le verbe grec est ici à un temps dit « aoriste ». Ce temps est utilisé pour préciser que l’action est terminée et qu’elle a abouti.

  Une traduction plus proche du texte de Plutarque serait : « pour gagner le territoire des Séquanes [César] traversa celui des Lingons. »

 - Une interprétation irrecevable
  Même affaibli par la traduction, ce passage est très clair : puisque César franchit le territoire des Lingons pour aller chez les Séquanes, il le traverse de part en part et à la sortie débouche bien là où il dit aller, chez les Séquanes.
  Il faudrait un minimum de justifications argumentées pour expliquer pourquoi malgré ce franchissement César ne serait pas parvenu chez les Séquanes.
  Au lieu de cela, on retrouve les mêmes procédés que pour le « In Sequanos » de César : le recours à une traduction imparfaite, sans commentaire précis et d’analyse du texte et cette étrange idée d’une traversée du territoire lingon suivie d’une sortie dans une autre direction que celle indiquée (les Séquanes).

  Ces petits procédés n’y peuvent rien : Plutarque dit clairement que l’armée romaine fut arrêtée chez les Séquanes, dans le Jura.

  
 Dion Cassius (155/235) - Référence : Histoire romaine, Livre XL – 39

  L’auteur grec de « l’Histoire romaine » donne cette indication sur la bataille de cavalerie : « [Vercingétorix] surprit [César] chez les Séquanes. » 

  Une erreur de traduction est impossible tant ces trois mots sont clairs et les ressources de l’à-peu-près grammatical inexistantes. C’est pourquoi, bien qu’étant forcé de reconnaître que Dion Cassius était « un historien bien informé », M. Reddé ajoute ensuite sans gêne que : « [Dion Cassius] (…/…) écrit près de trois siècles après les événements qui nous intéressent : l’espace de temps qui nous sépare de la fin du règne de Louis XIV. Son récit suit tantôt celui de César, tantôt s’en sépare, sans que nous sachions sur quelles autres sources il repose. »
  La ficelle est trop grosse. D’abord, Dion Cassius si « bien informé » avait accès aux archives romaines et aux historiens dont les textes ont disparu depuis, comme la guerre des Gaules de Tite-Live par exemple : voilà ses sources !  Ensuite, ignorons-nous tout des principaux événements militaires du règne de Louis XIV ?  Et avant, de Louis XIII, d’Henri IV, et de tant de batailles historiques lointaines, Orléans, Bouvines…

  Sans compter que Michel Reddé parle plus de 2000 ans après les faits : son témoignage vaudrait-il plus que celui de Dion Cassius établi 1 700 ans plus tôt ?  Que de logique, que de modestie !

  A juste titre Jérôme Carcopino qualifie cette argutie de « vague prétexte » et il ajoute que Dion Cassius « place en pays Séquane les deux emplacements voisins : celui de la bataille [de cavalerie] et celui de la place d’Alésia. »  Encore une fois, ce grand historien et grand latiniste a parlé.

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